Desired spaces, False mirror office
Home, sweet world!
Les conditions de confinement imposées par la pandémie de Covid-19 entraînent des changements majeurs pour ceux qui travaillent habituellement dans un lieu autre que leur propre maison. Leitmotiv de nombreuses réflexions récentes sur l'espace domestique, la maison s'est transformée en un lieu où coexistent de manière forcée des activités domestiques avec des fonctions qui, jusqu'alors, y étaient exercées de manière occasionnelle, spontanée et ponctuelle : du télétravail aux formes originales de banquet familial, en passant par les activités sportives et créatives. Cette coexistence forcée, qui risque de transformer le foyer en prison, a aussi le pouvoir de créer de nouvelles synergies entre les activités qui le peuplent, générant de profondes transformations dans la domesticité contemporaine.
La cohabitation forcée nous pose, à nous architectes, des questions réelles et intéressantes ; tout d'abord la question de l'intimité : l'espace personnel que nous avons l'habitude d'occuper à l'intérieur de l'environnement domestique est déformé par les nombreuses activités qui se déroulent maintenant dans nos maisons ; les cloisons traditionnelles de l'appartement ne sont plus en mesure de définir un nombre suffisant d'espaces séparés pour remplir toutes les fonctions requises : il est donc nécessaire de réfléchir à de nouveaux dispositifs d'ameublement pour la distribution flexible de l'espace, pour son insonorisation et pour la création de nouveaux niveaux d'intimité.
La quarantaine met en crise le long chemin parcouru par l'architecture, depuis la cuisine de Francfort jusqu'aux cellules mémorielles Metabolist qui survivent à Tokyo dans des hôtels capsules. Nous nous référons à l'idée d'existenzminimum et à la recherche continue d'optimisation de l'espace de vie vers des normes qui se sont souvent traduites par une simple réduction progressive des surfaces. Cette course vers le bas, dont on peut retracer de nombreux produits, de la chambre de l'universitaire parisien au studio-motel du jeune employé contemporain, révèle toute son insoutenabilité dans la quarantaine, lorsque ces espaces ne sont plus un logement pour passer quelques heures, mais deviennent notre monde dans la vie d'enfermement.
Dans le confinement, nous pouvons également observer le retour du foyer domestique sous ses formes les plus modernes, des réunions autour du canapé, aux moments de socialisation autour de la radio et de la télévision. Tout cela devient une occasion de concevoir des éléments qui vont au-delà d'une télévision et d'un haut-parleur intelligent pour devenir des dispositifs dans lesquels la technologie, d'une part, et le symbolisme et la matérialité de certains meubles traditionnels, d'autre part, peuvent revenir vivre ensemble : des totems technologiques pour la maison contemporaine.
Les espaces communs de nos lieux de vie, si souvent considérés comme acquis au point d'être oubliés, deviennent soudain le point de rencontre avec nos voisins, des lieux de sédimentation d'interactions sociales anciennes et nouvelles : c'est le cas du balcon qui se transforme en scène pour des sérénades chorales, du toit adapté en gymnase pour des séances de yoga ou en solarium pour une tintarella di primavera (la vraie revanche du cinquième point sur l'architecture de Le Corbusier), de la cour, redécouverte comme lieu de rencontre civique pour l'heure d'air des enfants, idéale pour un match de football improvisé. Ainsi, pendant l'enfermement, l'espace partagé de nos copropriétés devient un espace de résistance sociale, la dernière frontière entre nous et le monde extérieur dont nous avons été temporairement privés.
Lorsque l'urgence sera passée et que nous revivrons nos logements comme un environnement domestique, il sera difficile d'oublier le moment où ils sont devenus notre bureau, notre salle de sport, notre jardin, notre parc, notre place, notre cinéma et notre hôtel, où notre maison est devenue notre monde entier.
Cette image est une combinaison de six visions :
1. La revanche du jardin sur le toit
2. La fenêtre comme outil de vision de la vie
3. L'insoutenabilité de l'existenzminimum
4. La redécouverte des espaces communs : l'escalier comme rue
5. La redécouverte des espaces communs : la cour comme place
6. La redécouverte du foyer domestique